Carole Yerochewski et Yanick Noiseux (coordination)

Après plus de trente ans de mutations du travail et de l’emploi, qui se traduisent par une remontée du travail informel, y com – pris dans les pays industrialisés, doit-on encore parler de crise de la société salariale ? Est-ce que les métamorphoses de la question sociale, pour reprendre l’expression de Robert Castel, ne nous indiqueraient pas plutôt qu’il faille ajuster la focale d’observation et d’analyse ? En regroupant sous la catégorie d’informels les travailleurs atypiques, indépendants, à domicile, les précaires (sur)vivant de petits boulots, ce numéro s’inscrit volontairement dans les controverses sur la façon de caractériser le travail informel, tout en s’en démarquant. Le travail informel ne peut être considéré comme une sphère autonome de l’éco – nomie formelle. Activités informelles et formelles sont résolument imbriquées. On met ici l’accent sur les réalités expérimentées par les travailleuses et travailleurs informels et sur ce que leurs mobilisations apportent au renouvellement des perspectives théoriques, souvent (ethno)centrées sur la société salariale au Nord, en examinant leurs aspirations et leurs pratiques sociales. Car ces travailleuses et travail – leurs contestent l’ordre social sous de multiples aspects. En outre, les femmes, majoritaires dans le travail informel, y jouent un rôle important. C’est ce qu’illustrent les articles de ce numéro regroupés sous deux axes en mettant l’accent d’un côté sur les résistances, les contraintes institutionnelles et les adaptations et, de l’autre, sur les mobilisations.